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DIVORCE PAR CONSENTEMENT MUTUEL: COMMENT LIMITER LA NOTE FISCALE ?



Philippe Van Steenlandt, docteur en droit (Paris II Panthéon-Assas), notaire associé, directeur du service patrimonial de l’Etude notariale ALPHA NOTAIRES. Philippe.vansteenlandt@paris.notaires.fr


En cas de divorce par consentement mutuel, les époux ont l'obligation de liquider leur régime matrimonial et de régler concrètement le sort de ces biens, en principe en les répartissant par le biais d’un partage.


En cas de divorce par consentement mutuel, la loi impose aux époux de procéder au « règlement complet des effets du divorce » dans la convention qu’ils déposent chez le notaire ou qu’ils soumettent à l’homologation du juge. Cela se traduit notamment par l’obligation faite aux époux, d’une part, de liquider leur régime matrimonial, c’est-à-dire de déterminer les droits de chacun dans les biens communs, et, d’autre part, de régler concrètement le sort de ces biens, en principe en les répartissant par le biais d’un partage. L’inconvénient du partage des biens communs, généralement ignoré des époux, est qu’il supporte un impôt pouvant sensiblement accroître le coût du divorce (1). Une solution existe cependant : plutôt que de procéder au partage, les époux peuvent convenir de se maintenir dans l’indivision (2).


1. Le coût fiscal d’un partage de communauté


Tout partage, dès lors qu’il est constaté dans un acte, est assujetti à un impôt, communément appelé « droit de partage », égal à 2,50 % du montant de l’actif net partagé. Dans le cas d’un couple fortement endetté, cette imposition, alors quasi-nulle, ne soulève pas de difficulté. En revanche, en cas de faible passif, le coût du partage peut vite constituer un frein au règlement complet des effets patrimoniaux du divorce. Les époux n’acceptent généralement pas l’idée que leur séparation, souvent douloureuse, s’avère en outre onéreuse.

Exemple: Imaginons que le patrimoine commun du couple comprenne, activement, un appartement évalué à 200.000,00 € et, passivement, le solde du prêt ayant permis l’acquisition de ce bien de 20.000,00 €. L’actif net (actif – passif) est égal à 180.000,00 € (200.000,00 € – 20.000,00 €). La reprise de l’appartement et du prêt par un seul époux dans le cadre d’un partage génèrerait un impôt de 4.500,00 € (180.000,00 € x 2,5 %).


Dans la grande majorité des cas, le patrimoine commun des époux ne comprend, comme seul actif de valeur, que le bien immobilier constituant la résidence principale du couple. Si l’un des époux souhaite absolument reprendre ce bien, le partage et les droits y afférents sont inévitables. Mais si les époux acceptent de ne pas partager, la note fiscale peut être considérablement réduite.


2. L’alternative au partage : la convention d’indivision


Une pratique de plus en plus répandue invite à vendre le bien immobilier commun et à se partager verbalement son prix avant le divorce (a). Mais en réalité, seule la conclusion d’une convention d’indivision permet d’éviter sans risque l’exigibilité du droit de partage (b).


a. L’impossible partage verbal du prix de vente de l’immeuble commun


En matière de partage, il existe une règle importante : pas d’impôt sans acte constatant le partage. Autrement dit, un partage verbal ne supporte aucun impôt. Sur le fondement de cette règle, il a pu être soutenu que si les époux vendent un bien commun avant le divorce et s’en partage ensuite le prix, ils pourraient échapper au droit de partage. Mais procéder de la sorte est accepter d’encourir un risque important. En effet, tout comme le bien commun vendu, le prix de vente qui le remplace dans le patrimoine des époux est aussi commun. Or les époux ne peuvent procéder au partage d’un bien commun (ici le prix de vente) en dehors de la convention de divorce.


Et ce pour deux raisons:


- La première tient au principe d’immutabilité des régimes matrimoniaux duquel il résulte notamment que le partage d’un bien commun n’est en principe possible qu’après la dissolution du régime matrimonial, donc après le divorce. Avant, seule la convention de divorce, expressément autorisée par le législateur à déroger audit principe, peut donc renfermer le partage d’un bien commun.


- La seconde tient aux obligations incombant aux époux en cas de divorce par consentement mutuel. Ainsi que nous l’avons dit, la loi impose aux époux, dans un tel cas, de procéder au « règlement complet des effets du divorce » dans la convention qu’ils déposent chez le notaire ou qu’ils soumettent à l’homologation du juge, ce qui exclut la possibilité d’y procéder en dehors. En définitive, si partage il y a, celui-ci doit être contenu dans la convention de divorce et par conséquent soumis au droit de partage. Tout autre procédé exposerait les époux à un double risque, juridique (de remise en cause du partage opéré) et fiscal (de redressement fiscal).


b. La conclusion d’une convention d’indivision


L’unique solution permettant sans risque d’éviter l’application du droit de partage consiste à n’opérer aucun partage, ce qui est, du reste, parfaitement possible. La loi, en cas de divorce par consentement mutuel, n’impose pas aux époux de procéder au partage des biens communs mais, plus généralement, de régler concrètement le sort de ceux-ci. Si le partage est un moyen de parvenir à ce règlement, les époux ont également la possibilité, afin de satisfaire à leur obligation, de conclure une convention dans laquelle ils conviennent de se maintenir dans l’indivision et organisent leurs rapports juridiques à propos des biens communs. Il est en effet admis qu’une telle convention puisse, à l’instar d’un partage, utilement compléter la liquidation du régime matrimonial et tenir ainsi lieu de règlement complet des effets patrimoniaux du divorce. En résumé, pour satisfaire à l’obligation leur incombant dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel, les époux doivent impérativement liquider leur régime matrimonial et, au choix, soit partager les biens communs, soit conclure une convention d’indivision relativement à ces biens.


Ainsi, lorsqu’aucun d’eux ne souhaite absolument conserver le bien immobilier commun, les époux peuvent, afin d’optimiser le coût de leur séparation, convenir de se maintenir dans l’indivision sur ce bien. En l’absence de partage dans la convention de divorce, aucun droit de partage n’est logiquement exigible.


Une fois divorcés, les époux pourront continuer à jouir du bien immobilier dans les conditions fixées par la convention d’indivision ou, au contraire, décider de le vendre. En cas de vente, ils pourront alors se partager le prix sans devoir aucun droit de partage. Par ailleurs, dans l’hypothèse où les époux réaliseraient une plus-value lors de cette vente, ils conserveront, sous certaines conditions, le bénéfice de l’exonération pour cession de la résidence principale


En définitive, la convention d’indivision aboutit au même résultat que la vente-partage du prix avant divorce mais avec l’insigne avantage de ne présenter aucun risque, ni juridique ni fiscal. De surcroît, elle présente l’avantage de permettre un divorce rapide des époux, ceux-ci s’épargnant la nécessité de vendre le bien immobilier avant de divorcer, et partant le risque de « mal » vendre, dans la précipitation, le bien.


rédigé avec Vincent MULLER, spécialiste en divorce





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